Le 28 novembre 2018, un cadre juridique dédié à la cohabitation intergénérationnelle solidaire est né grâce à la loi ELAN. Cette dernière est venue lever des risques juridiques qui avaient été pointés trois années auparavant dans la loi d’adaptation de la société au vieillissement. Le 13 janvier 2020, une charte venait préciser par arrêté le « cadre général et les modalités pratiques » du dispositif, en réponse aux souhaits du législateur. Cependant, malgré ces avancées, certains vides juridiques freinent le développement du dispositif solidaire que nous portons.
Encadrer le caractère “modeste” de la contrepartie financière
La contrepartie financière “modeste” ne doit pas être au prix normal d’un loyer sur le marché de la chambre chez l’habitant ou d’une colocation. Un des objectifs de la cohabitation intergénérationnelle solidaire est en effet de permettre aux jeunes de bénéficier de prix significativement en deçà du marché locatif local. Il ne s’agit pas de rentabiliser un surplus d’espace au dépend de la solidarité envers les jeunes : le budget mensuel d’un étudiant en France est estimé par l’ISPOS à 590 € en 2019. Si le montant est au niveau du prix du marché, que deviennent la solidarité et le caractère “modeste” de la contrepartie voulue par le législateur ?
Le principe qui préside à la cohabitation intergénérationnelle solidaire est l’entraide. L’entraide est un modèle alternatif au travail, au marché ou au commerce, et c’est ce modèle “minimaliste” qui apporte de la valeur aux jeunes, aux seniors, aux familles et à la société. En se basant sur la réciprocité, il ne nécessite pas d’avoir recours à des flux financiers conséquents, et c’est là tout sons intérêt. C’est d’ailleurs un des points que Cohabilis veut démontrer cette année dans le cadre d’une recherche réalisée par 4 économistes et financée par l’AGIRC ARRCO, la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) et la Mutualité Fonction Publique (MFP).
Cohabilis, les unions d’aide au logement des jeunes UNCLLAJ et UNHAJ, la première organisation syndicale de France, la CFDT et CFDT Retraités, l’Uniopss (l’union la plus importante de structures de l’ESS dans les champs social, médico-social et sanitaires) ont soutenu ensemble une position commune le 7 décembre 2020 : la nécessité de définir le caractère « modeste » de la « contrepartie financière », voulue par le législateur en lieu et place d’un “loyer”, dans le cadre de la loi Elan. Cette action est nécessaire afin que des « mirages de solidarité » qui dévoient l’esprit du dispositif ne soient plus possibles.
L’application des recommandations définies par la “charte de la cohabitation intergénérationnelle” doivent être rendues obligatoires
Pour ne pas dévoyer la “cohabitation intergénérationnelle solidaire”, il conviendrait que les structures et associations à but non lucratif œuvrant au développement de ce dispositif ne puissent utiliser l’appellation de “cohabitation intergénérationnelle solidaire”, que si elles respectent strictement les termes de l’article 117 de la loi ELAN et de la charte du 13 janvier 2020. A défaut, elles devraient être soumises aux dispositions de la loi de 1989.
L’égalité d’accès aux droits des jeunes en cohabitation intergénérationnelle doit être assurée
De plus, il nous semble indispensable que les jeunes aient accès – au plus vite – aux aides suivantes :
- Les jeunes sont normalement éligibles à l’allocation logement. Or, certaines CAF leurs dénient ce droit. Serait-il possible d’avoir un positionnement ferme sur ce point ? Les jeunes engagés dans les dispositifs de cohabitation intergénérationnelle solidaire ont souvent des revenus modestes, en particulier en période de Covid. Il serait inhumain de les priver de cette aide, par ailleurs versée à tous les jeunes en location ordinaire.
- Aujourd’hui, les prestations d’Action logement ne sont pas accessibles aux jeunes. Pour les mêmes raisons que celles évoquées ci-dessus, il nous semble indispensable que ces jeunes aient accès au dispositif de garantie Visale et à la prestation Mobili-Jeunes.