L’habitat partagé permet de lutter contre la solitude

Nous sommes le 23 janvier 2021, Journée des solitudes. Le temps est maussade sur une bonne partie de la France, et on a bien envie de positiver, de vous parler de ce qui permet d’éviter ce sentiment mélancolique qui vient quand on manque depuis trop longtemps de lien social ! Nous allons donc vous parler de l’habitat partagé, et plus particulièrement de la cohabitation intergénérationnelle solidaire.

Qu’est-ce que l’habitat partagé ?

L’habitat partagé recouvre aujourd’hui un ensemble très divers de dispositifs qui sont caractérisés par : le soutien d’un lien social convivial, la promotion de l’entraide (modèle économique suffisant pour résoudre de nombreuses problématiques du quotidien sans avoir recours à du “travail” ou à des “prestations de service”) et – très souvent – l’inclusion de personnes ayant des vulnérabilités sociales.

L’inclusion peut concerner des publics très différents : par exemple, une mère seule avec trois enfants, des personnes handicapées mentales, une personne âgée seule, un jeune avec un très faible pouvoir d’achat… Mais l’habitat partagé n’est jamais seulement tourné vers des personnes exclues, parce qu’en toute logique il suppose – pour qu’il y ait un mouvement d’inclusion – un lien avec des personnes “non exclues”. De plus, lorsque l’inclusion devient effective, rapidement on ne sait plus trop : qui “inclut” qui ? Le constat de la réciprocité est donc souvent de mise dans ces dispositifs.

Nous prenons la liberté de ranger la cohabitation solidaire au sein d’un seul logement – celui du senior dans le cas de la cohabitation intergénérationnelle (il existe aussi par exemple la cohabitation solidaire avec les réfugiés…) – dans le champ de l’habitat partagé. Il s’agit d’un “micro” habitat partagé. Et c’est de l’impact de ce type d’habitat partagé sur la solitude dont nous voulons parler.

L’impact de la cohabitation intergénérationnelle sur la solitude des jeunes et des seniors

Il faut distinguer sentiment de solitude et isolement. C’est ce que nous enseigne la pratique de la cohabitation intergénérationnelle depuis 15 ans. Une personne ayant une vie sociale dense pourra se sentir seule en rentrant chez elle le soir, alors qu’une autre vivant seule recherchera et appréciera sa solitude. Il y a donc bien plusieurs solitudes, au sens où il y a plusieurs manières de vivre la situation objective d'”être seul”. L’étude IFOP pour Astrée vient confirmer ce constat : “Il est notable de constater que seulement un tiers des Français isolés indiquent se sentir toujours ou souvent seuls, sentiment de solitude et fréquence des relations sociales ne se confondent donc pas totalement.”

Le dénominateur commun des seniors – 85% de femmes – qui viennent vers les associations membres de Cohabilis n’est donc pas l’isolement, mais bien le sentiment d’être seul. C’est un point qui a également été confirmé dans l‘étude réalisé par Cohabilis pour la CNAV en 2020.

La cohabitation intergénérationnelle solidaire suppose la présence d’un jeune de moins de trente ans chez soi. Le jeune est “engagé” dans le dispositif tout autant que le senior. Il le fait d’abord pour la recherche de lien social, et c’est bien l’objectif retenu pour le législateur dans la loi ELAN en 2018 : la cohabitation intergénérationnelle est mise en œuvre , afin de renforcer le lien social “. L’un des apports marquants et très largement partagé par les seniors pratiquant la cohabitation intergénérationnelle est le sentiment d’utilité sociale.

C’est aussi le cas pour les jeunes qui sont 87% à être conscients d’apporter au senior dans le cadre de la cohabitation intergénérationnelle solidaire. L’autre objectif retenu par le législateur est par ailleurs de “faciliter l’accès à un logement pour les personnes de moins de trente ans.” Et les jeunes logés bénéficient aussi de logements… confortables. Enfin, et surtout, en ce 23 janvier 2021, ils bénéficient, eux aussi, d’une présence au quotidien. Et c’est fondamental. En effet, l’étude IFOP pour Astrée citée plus haut nous confirme ce que nous observons depuis 15 ans : ce sont les jeunes qui sont les plus largement concernés par ce ressenti [de solitude]”.

Il est temps de réguler mieux et de soutenir franchement le développement du dispositif solidaire

Il est temps de mettre en place une politique qui favorise la cohabitation intergénérationnelle solidaire pour les jeunes qui souffrent de solitude et du niveau de vie le plus bas de la société. Il est temps de favoriser plus largement ce dispositif solidaire en l’encadrant mieux afin que les entrepreneurs opportunistes cessent de dévoyer son caractère solidaire en enjoignant les seniors qui accueillent des jeunes – plus que jamais en difficultés en cette période de Covid ! – à pratiquer des prix au niveau de ceux du marché, voire plus. Ce n’est pas le sens de “la contrepartie financière modeste” voulue par le législateur. La cohabitation intergénérationnelle doit rester solidaire, pour les jeunes comme pour les seniors. L’habitat partagé doit rester une filière d’espoir pour le lien social, notamment pour lutter contre la solitude subie.

Les prix exorbitants du marché immobilier ne doivent pas être un frein pour les jeunes. C’est le pari réussi de la cohabitation intergénérationnelle solidaire telle qu’elle est pratiquée par les membres de Cohabilis.